FAITS
Le 17 juillet 2018, la SQI lance un appel d’offres public pour la première phase (phase A) des travaux de finition intérieure du Centre intégré de cancérologie du nouveau complexe hospitalier de Québec.
L’estimation réalisée à l’interne par la SQI pour la réalisation de ces travaux prévoit une somme de 1 445 056 $.
Suivant ledit appel d’offres, deux soumissions ont été déposées dont celle d’ITR Acoustiques Québec inc. (ci-après « ITR ») laquelle prévoyait des coûts de 2 231 000 $.
Le 13 septembre 2018, la SQI a confirmé aux représentants d’ITR qu’elle était la plus basse soumissionnaire conforme. Elle lui a toutefois demandé de lui faire parvenir la ventilation de sa soumission en raison de l’écart important entre le prix présenté dans celle-ci et l’estimation interne des travaux.
Or, le 10 octobre 2018, le directeur exécutif du projet indique à ITR que la SQI se prévaut plutôt de la clause de réserve et annule l’appel d’offres.
La SQI publie ensuite un nouvel appel d’offres qui regroupe la première et la deuxième phase du projet (phases A et B). ITR présente de nouveau une soumission dans le cadre de ce second appel d’offres. Toutefois, le contrat est octroyé à un soumissionnaire dont l'estimation prévoit des coûts pour la phase A du projet qui sont supérieurs à ce que prévoit ITR.
ITR intente donc un recours en dommages-intérêts contre la SQI afin de réclamer la perte de profit dont elle a été privée en raison du rejet de sa soumission au motif que celle-ci a illégalement eu recours à la clause de réserve prévue aux documents d’appel d’offres.
Quant à elle, la SQI prétend plutôt l’utilisation de cette clause était valide, car la soumission d’ITR dépassait de 54 % l’évaluation des coûts réalisée par la SQI.
La décision de la Cour d’appel
En Cour supérieure, le tribunal a examiné le comportement de la SIQ au moment où celle-ci a pris la décision d’annuler l’appel d’offres, et ce, afin de valider le bien-fondé de l’utilisation de la clause de réserve. Cet examen s’articulait autour de trois critères, soit :
- La bonne foi présumée de la SQI;
- L’attitude prudente de la SQI;
- Le dépassement du budget.
La preuve présentée lors de l’audience a démontré que l’annulation de l’appel d’offres était justifiée par l’écart important entre l’estimation interne et les prix prévus dans les soumissions reçues pour la première phase du projet.
C’est de bonne foi et dans l’optique d’éviter un dépassement de coût important que la SQI a décidé de fusionner les travaux de la phase A et de la phase B en un seul et même appel d’offres. Elle croyait ainsi pouvoir réaliser une économie d’échelle.
Rappelons que le processus d’appel d’offres a pour objectif l’utilisation optimale des ressources publiques.
En l’espèce, la Cour d’appel a confirmé les motifs du juge de la Cour supérieure voulant que l’approche de la SQI se justifiait par des considérations objectives dont la surchauffe potentielle du marché, la nécessité d’effectuer les travaux et l’économie d’échelle potentielle.
Les motifs invoqués par la SQI respectaient ainsi les balises imposées par la Cour suprême quant à l’utilisation des clauses de réserve dans les documents d’appel d’offres publics. En effet, même si ces clauses ont été validées par les tribunaux, le principe de l’équité entre les soumissionnaires doit être en tout temps respecté2 . Cela a été le cas en l’espèce.
La Cour d’appel confirme ainsi le jugement de la Cour supérieure et le recours d’ITR est rejeté.
CONCLUSION
Cet arrêt de la Cour d’appel confirme que les donneurs d’ouvrage peuvent se prévaloir des clauses de réserve prévues dans les documents d’appel d’offres sans encourir de responsabilité s’ils ont agi avec équité, de bonne foi et de façon justifiée.
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1 ITR Acoustique Québec inc. c. Société québécoise des infrastructures, 2021 QCCA 1900 (CanLII).
2 Martel Building Ltd. c. Canada, 2000 CSC 60, [2000] 2 R.C.S. 860.