Article rédigé par Geoffroy Bertrand, ing., MBA, PMP, FTI Consulting ainsi que Me René-Martin Langlois, avocat associé, Langlois
L’utilisation du Building Information Modeling, communément appelé BIM, est de plus en plus répandue au Québec autant au niveau des projets publics que privés. Le BIM est traditionnellement vu comme un outil permettant la représentation numérique des différentes caractéristiques physiques et fonctionnelles d’un ouvrage. Il agit comme vecteur de communication favorisant une collaboration plus étroite entre les intervenants et devant, à terme, contribuer à réduire les difficultés rencontrées dans les projets de construction, à titre d’exemple : les enjeux relatifs à la coordination interdisciplinaire des plans et devis, aux conditions physiques, aux changements initiés par le propriétaire et à tous les autres imprévus pouvant survenir en cours de chantier.
Au-delà de son utilité durant la phase de planification ou d’exécution d’un projet, le BIM peut également être utilisé dans le cadre de recours judiciaires ou d’arbitrages afin de simplifier l’administration de la preuve au soutien d’une réclamation, mais aussi dans le contexte de modes alternatifs de règlement de différends, comme la médiation qui gagne à être davantage utilisée.
En effet, les dossiers de construction présentent habituellement un niveau de complexité élevé en raison notamment du nombre d’inter-venants impliqués, du volume impressionnant de documents produits à toutes les étapes du projet et de la durée des chantiers, sans compter le caractère hautement technique des enjeux qu’ils suscitent. Dans ce contexte, les avantages que peut procurer une maquette numérique font du BIM un atout important pour ceux qui osent y recourir.
Le BIM et la maquette numérique peuvent être utilisés de diverses manières. Pour les fins de cet article, nous avons identifié les trois (3) utilisations suivantes :
1. La visualisation 3D du projet
La maquette numérique est un outil fort utile pour faciliter la compré-hension d’un projet et des problématiques rencontrées. Comme une image vaut milles mots, la maquette numérique permet à l’entrepreneur d’offrir un visuel détaillé et interactif de l’ensemble du projet et de ses composantes, de la portée des travaux ainsi que des contraintes opérationnelles vécues in situ en cours de chantier.
2. La simulation d’un échéancier tel-que-planifié vs. tel-que-réalisé
Le BIM 4D consiste en la création de liens intelligents entre la maquette numérique et les données temporelles (échéancier de référence). Ces liens permettent ensuite de créer une simulation 3D spatio-tempo-relle démontrant la séquence planifiée des travaux. Le BIM 4D est majoritairement utilisé par les entrepreneurs pour (i) la planification des phasages de projet, (ii) l’optimisation de l’échéancier de référence ou encore pour (iii) la détection de conflits et/ou de contraintes de construction. Or, le BIM 4D peut aussi permettre aux entrepreneurs de faire la démonstration des impacts causés par le propriétaire ou par un tiers, par exemple, sur le cheminement critique du projet en comparant la séquence planifiée à la séquence réelle des travaux. Pour ce faire, il s’agit simplement de créer une deuxième simulation 3D spatio-temporelle en ayant recours, cette fois-ci, à l’échéancier tel-que-réalisé pour, ensuite, comparer ces deux simulations.
3. Simplification d’un impact technique
Finalement, la maquette numérique peut aussi servir à expliquer l’impact des changements survenus dans le cadre d’un projet. En juxtaposant la conception initiale avec la conception modifiée (incorporant le changement proposé), les parties sont ainsi en mesure de visualiser plus facilement la portée des changements sur les travaux ainsi que leurs impacts.
En conclusion, nous sommes présentement au cœur d’une vague de changements majeurs dans l’industrie de la construction, caractérisée par ce que plusieurs appellent une révolution numérique « Construction 4.0 ». Les avancées technologiques, dont le BIM fait partie, nous forcent à remettre en question les façons de faire traditionnelles, à innover et à nous réinventer. L’utilisation d’outils numériques en soutien à la présentation de réclamations deviendra un incontournable dans les prochaines années. Les entrepreneurs généraux ont tout avantage à se familiariser dès maintenant avec ces nouveaux outils et incidemment à en tirer profit.